top of page

Homélie pour le 17E dimanche du Temps ordinaire | 30/07/2023 - Année A | P. Damien Desquesne


Encore une fois, je me dois de vous parler du Royaume des cieux. Ce n’est pas de ma faute ; ce sont les passages d’Évangile des derniers dimanches qui imposent ce thème. À vrai dire, la question du Royaume des cieux n’est pas celle de quelques passages, mais de tout l’Évangile. Dès le début, le Règne de Dieu était attendu : « Tout le peuple était en attente » (Lc 3,15). Et curieusement, la proclamation de ce Règne ne paraît pas avoir satisfait les contemporains de notre Seigneur. Qu’on se rappelle cette question posée à Jésus quelques instants avant l’Ascension : « Est-ce maintenant que tu vas rétablir la royauté en Israël ? » (Ac 1,6)


Actuellement, qu’en est-il du Royaume des cieux ? Deux choses doivent être tenues en même temps :


Tout d’abord, le Royaume des cieux a été bel et bien inauguré dans la résurrection de Jésus d’entre les morts. Souvenez-vous de ce qu’il déclare aux disciples lors de son apparition en Galilée : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre » (Mt 28,18). Cela suffit à dire la condition royale du Christ. Dans le Ressuscité, la puissance de Dieu s’exerce sans rencontrer le moindre obstacle.


Cependant, il faut dire également que la pleine manifestation du Royaume des cieux est encore à attendre : la victoire du Christ sur la mort n’a pas encore été remportée en chacun. Ajoutons à cela que cette manifestation tarde… Et c’est là, frères et sœurs, l’épreuve chrétienne par excellence. Bien sûr, les épreuves dont nous pouvons être affligés sont multiples et variées, mais elles peuvent toutes se rattacher à celle-là. Et c’est pourquoi le peuple chrétien prie unanimement : « Que ton Règne vienne ! »


Certes, il ne suffit pas d’attendre… Il y a des choses que nous pouvons et devons faire, des choses qui vont dans le sens du Royaume des cieux. Et l’Évangile ne manque pas de nous mettre devants nos responsabilités. Il s’agit de produire un fruit de justice. Mais il y a un tel mystère d’iniquité qui transit le monde que la bonne volonté humaine ne peut en venir à bout. Qu’on se rappelle ce mot que nous trouvons dans la première épître de saint Jean : « Le monde entier gît au pouvoir du Mauvais » (1 Jn 5,19). L’humaine puissance ne peut à elle seule exorciser ce pouvoir.


Parmi les paraboles que nous avons entendues, certaines évoquent l’aspect que j’ai souligné, à savoir que la pleine manifestation est encore à attendre. Le temps où nous sommes est celui ou le filet est jeté dans la mer. Viendra le moment où ce qui est bon sera réservé dans des paniers et ce qui ne vaut rien sera rejeté. Dans la parabole du bon grain et de l’ivraie, nous voyons que le temps où nous sommes est celui où les fils du Royaume doivent developper leur croissance alors que violence est faite à leur encontre. Un jour viendra le temps de la moisson, image du jugement, où « les justes resplendiront comme le soleil dans le Royaume de leur Père » (Mt 13,43).


Cela fait penser à cet autre passage que nous trouvons vers la fin de l’Évangile selon saint Matthieu : « Le Fils de l’homme viendra dans sa gloire, avec ses anges ; il s’assiéra sur son trône de gloire » (Mt 25,31). De façon plus nette que précédemment, ce passage se rapporte à la manifestation universelle du Royaume des cieux. Comme plus haut, les anges — serviteurs fidèles du Royaume — seront à la manœuvre. Le Roi paraîtra comme un Juge : sa parole sera suivie d’effet. Il y aura un tri, une séparation des brebis des boucs, du bon grain de l’ivraie, des justes et des injustes.


De tout cela, nous pouvons conclure que le Royaume des cieux ne peut pas ne pas advenir. Il ne doit y avoir aucun doute là-dessus. Mais c’est à la fin seulement qu’il sera pleinement manifesté. Ce sera à la fois un jugement et la fin du temps de l’épreuve, de ce temps où le Royaume subit la violence.


En fait, il n’a pas fallu longtemps aux premiers chrétiens pour réaliser ce que cette vérité demande à nos âmes. Alors qu’ils étaient témoins des premiers pas de l’Église dans l’histoire, il leur fallait attendre ; et attendre avec patience. C’était déjà le temps de l’épreuve ; déjà le Royaume des cieux se faisait attendre.


Mais la patience est bien plus que d’être bien sage. Elle doit se nourrir d’une force divine : l’espérance, vertu qui nous a été donnée lors de notre baptême. En effet, par ce sacrement, Dieu nous a déjà arrachés à l’empire des ténèbres et nous a transférés dans le Royaume de son Fils bien aimé (Col 1,13).


Permettez-moi de vous inviter à attendre encore. Pour vous-mêmes, tenez bon dans l’espérance. Nous avons en effet à attendre quelque chose que Dieu seul peut nous donner : le salut de nos âmes (1 P 1,9). Mais il faut aussi tenir bon d’une patience qui fait partie du témoignage de foi dans le monde. Celui-ci n’attend rien, sinon peut-être la catastrophe finale. Et la force qui alimente la patience et l’espérance, nous ne la trouverons pas ailleurs que dans l’eucharistie. Car elle est le sacrement qui proclame déjà la Venue du Seigneur dans la gloire (voir l’anamnèse).



23 vues0 commentaire

コメント


bottom of page