« Jésus vint et il était là au milieu d’eux » Le passage d’Évangile que nous venons d’entendre évoque la double apparition du Ressuscité en ces termes : le Seigneur vint et il était là… Une venue et une présence dans la chambre haute parmi ses disciples, ceux avec qui il a mangé et bu après sa résurrection. L’évangile signale encore les deux moments où ces apparitions ont eu lieu : le soir du premier jour de la semaine et huit jour plus tard.
Ces moments ne relèvent pas du hasard, mais ils scandent un rythme : de huit jours en huit jours, chaque premier jour de la semaine, c’est-à-dire le premier et le huitième jour. Un jour de notre temps et un jour au-delà du cycle de la semaine : le jour dernier, le jour du dénouement heureux de l’histoire, car « les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur » (Jn 20,20). Ce rythme trahit une volonté délibérée de la part du Seigneur pour venir vers les siens et être présent à eux ; cette venue et cette présence se produisent au jour qu’il a choisi : chaque huitième jour, chaque dimanche, le premier jour de la semaine, un « jour que fit le Seigneur », un « jour de fête et de joie » (Ps 118(117),24).
Je voudrais insister ce matin sur la particularité du dimanche, sur le caractère original de cette venue et de cette présence. Avant la mise eu tombeau, on pouvait approcher librement Jésus. Les hommes et les femmes qui cherchaient à le voir se mettaient en route et pouvaient le trouver. L’évangile en fourmille d’exemples : le jeune homme riche qui voulait obtenir la vie éternelle, le centurion de Capharnaüm qui voulait la guérison de son esclave, Nicodème, Jaïre, le chef de la synagogue, etc…
Mais cet accès est maintenant fermé. On ne peut plus l’emprunter. « Si nous avons connu le Christ selon la chair, dit Paul, à présent ce n’est plus ainsi que nous le connaissons » (2 Co 5,16). Bien sûr, il y a toujours une possibilité de rencontrer le Seigneur, mais désormais c’est lui qui prend l’initiative. Il ne se montre plus qu’aux témoins choisis d’avance. C’est son initiative, mais il n’y a cependant rien d’arbitraire. Le Ressuscité fonde ce temps où il vient pour renouveler sa présence corporelle au milieu des siens…
De huit jours en huit jours, c’est-à-dire lors de notre dimanche. Pourquoi en est-il ainsi ? Pourquoi pareil changement ? Parce que la résurrection fait asseoir Jésus à la droite du Père. Il n’est plus soumis à la mort, comme le dit saint Paul : « ressuscité des morts, le Christ ne meurt plus, sur lui la mort n’a plus aucun pouvoir » (Rm 6,9). Pour prolonger la pensée de l’apôtre, si la mort n’a plus aucun pouvoir sur le Ressuscité, c’est maintenant lui qui domine la mort. Le rapport est inversé.
Et cette inversion vaut aussi pour les lois de l’univers. Le Christ n’y est plus soumis ; il ne peut plus être circonscrit à l’intérieur des limites de l’espace et du temps. Ceux-ci tiennent désormais dans sa main. Ils ne sont plus un obstacle pour « se faire voir » (Lc 24,34). Le Ressuscité s’y introduit - de huitième jour en huitième jour - dans ce but précis d’en briser leur limite et d’en faire un espace où l’homme peut s’ouvrir à l’éternité. Comme il est urgent que nous soyons au rendez-vous dominical !
Laissez-moi vous le redire, c’est le jour où le Ressuscité vient vers nous dans la nouveauté pascale pour être avec nous. C’est le jour où il nous dilate aux dimensions de l’éternité ; le jour où nous nous préparons au dénouement heureux de l’histoire : Jour que fit le Seigneur ! Jour de fête et de joie.
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