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Homélie pour le Jeudi saint| 06/04/2023 | P.Damien Desquesnes.



Ce soir, nous faisons mémoire de la Cène, de ce dernier repas que le Seigneur prit avec ses disciples avant de souffrir.


Pour bien comprendre ce qui se passe à ce moment-là, il faut nous plonger dans les lectures que nous avons entendues. Elles nous rappellent qu’avant la sortie d’Égypte Dieu prescrit à Moïse et à Aaron comment célébrer cette Sortie d’âge en âge. Cette commémoration consiste en un repas — un repas pascal — : on y mangera un agneau avec des herbes amères et des pains non levés. De la même façon, Jésus, en mourant et en ressuscitant, va vivre un Exode — sa sortie de ce monde pour passer au Père — ; et il prend soin de laisser, Lui aussi, la forme du mémorial pour célébrer sa Sortie jusqu’à ce qu’Il vienne (1 Co 11,26). Ce mémorial, qui a également la forme d’un repas, est au cœur de nos eucharisties. Chacune nous plonge en effet dans l’événement de la mort et de la résurrection du Seigneur.


Vous l’avez compris, Jésus fait œuvre de fondateur. Il institue quelque chose de neuf, quelque chose que nous n’avons pas le droit de changer et dont saint Paul nous donne le détail. Dans la foulée, Jésus impose aussi une charge à ses apôtres : « faites cela en mémoire de moi. » Il fait d’eux les hommes qui présideront l’eucharistie de l’Église.


Tout cela, je vous en ai parlé en introduisant cette liturgie, mais il est bon maintenant d’aller un peu plus loin. Car le Seigneur ne se contente pas d’élaborer un rituel minutieux, comme si c’était une cérémonie du thé. Jésus cherche à transmettre aux siens quelque chose de moins aisé à définir… Il s’agit de la mentalité et du style qui sont les siens, et qui, si nous les adoptons, témoigneront de notre réelle communion avec lui. Cet esprit, c’est l’AGAPÈ ; c’est l’amour de bonté, c’est l’attention à la fragilité de l’autre ; c’est cette charité qui s’abaisse, qui ne fait pas acception des personnes, qui veille à ne pas scandaliser le frère pour lequel le Christ est mort.


Frères et sœurs, remarquez-le… Ce soir, le Seigneur ne nous tient pas de longs discours. Toute sa prédication passe à présent dans des gestes, dans des actions, c’est-à-dire dans ce qui est l’expression d’une vie. Ce soir, des pieds sont lavés ; du pain est pris, béni, rompu et partagé ; ce soir, Jésus demande aux siens de poser des actes, de mettre en pratique un commandement : laver les pieds les uns des autres, c’est-à-dire avoir entre frères un amour semblable à celui que Jésus a pour nous. Ce commandement que nous veillons à inscrire dans notre existence témoignera sûrement de la solidité de la foi en l’eucharistie et du sérieux de notre communion avec le Seigneur.


Bien sûr, la foi est au principe de toute vie chrétienne et de la participation à l’eucharistie. Quand nous nous approchons de l’autel, nous devons croire que nous recevons le Christ qui s’est livré pour nous. Saint Paul ne nie pas cela quand il dit : « Celui qui ne discerne pas le corps mange sa propre condamnation (1 Co 11,29). » Quand il évoque le corps, c’est bien le corps du Christ qu’il a à l’esprit, mais le contexte indique que Paul voit le corps plus largement que le corps individuel… C’est le Corps de l’Église, ce Corps dont le Christ est la Tête (Eph 1,22-23), le Christ total de saint Augustin.


La foi est donc au principe, comme le disait saint Ignace d’Antioche, et l’amour est la perfection, car il est communion des membres de l’Église. La foi en l’eucharistie appelle l’amour fraternel pour que l’Église soit appelée la « Charité des frères », selon une autre expression de saint Ignace.


J’insiste beaucoup là-dessus ! La vie chrétienne n’est pas enfermée dans la limites du temps de la célébration liturgique. Le Seigneur le rappelle : « Quand tu présentes ton offrande à l’autel, si là tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, laisse là ton offrande, et va d’abord te réconcilier avec ton frère… (Mt 5,23-24) »


Oui. La meilleure façon d’exprimer notre respect, notre action de grâce pour le don de l’eucharistie, c’est de vivre selon le Testament spirituel du Seigneur, de le faire nôtre en faisant comme les apôtres : en demeurant longtemps avec Lui pour nous imprégner de sa manière de vivre et d’être. Ce Testament demande d’aimer l’Église pour laquelle Lui, Jésus, s’est livré totalement. Ce Testament consiste enfin à poser, pour les aimer, un regard de foi sur nos frères, en reconnaissant en eux des hommes et des femmes qu’il a rachetés par son sang.





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