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« SINON A QUOI JE SERS ? », Père D. Janthial | Fête du Corps et du Sang du Seigneur | 14/06/2020



Je vous l’avais dit dans une homélie confinée, je désirais beaucoup que nous puissions recommencer à célébrer ensemble pour la Pentecôte. Était-ce mon attachement à cette fête ou mon impatience légendaire, il me semble bien que je n’avais pas compris le plan de Dieu. Car il semble bien que le plan de Dieu, c’était de nous faire recommencer les messes dominicales aujourd’hui en cette fête du Corps et du Sang du Christ, cette Fête-Dieu comme on disait autrefois. Aujourd’hui tous ne sont pas revenus vous le voyez bien mais vous, vous êtes là pour célébrer Jésus qui se rend présent dans le sacrement de l’Eucharistie. Le confinement aura été une épreuve pour beaucoup. Le mot de crise a été employé. Si les crises sont révélatrices, il y a fort à parier que celle-ci l’aura été aussi du point de vue du rapport des chrétiens à l’eucharistie.


Depuis quelques années, beaucoup de gens se sont détourné de l’Eucharistie, de la participation à la messe. « Je ne vois pas ce que cela peut m’apporter », disent certains. Est-ce à dire qu’ils ne font que ce qui peut leur apporter quelque chose ? Au fond rien n’a changé depuis le temps de Jésus car après qu’il ait prononcé dans la synagogue de Capharnaüm le discours du pain de vie dont nous venons d’entendre une partie, Saint Jean rapporte que beaucoup parmi les disciples cessèrent de suivre Jésus (Jn 6,66). Ce fut un moment de crisis, de discernement. Et Jésus ne les retint d’ailleurs pas, il ne leur court pas après. Il demande simplement aux douze apôtres : « voulez-vous partir vous aussi ? » et Saint Pierre a cette réponse admirable : « Seigneur auprès de qui irions nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle ! » (Jn 6,68).


Et, de fait, il est beaucoup question de vie dans le discours de Jésus. « Moi je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair pour que le monde ait la vie » (Jn 6,51). Il faut bien comprendre ce que vivre veut dire. Vivre ce n’est pas seulement éviter la mort en se nourrissant et en s’abreuvant. Vivre c’est avoir des objectifs, des projets, progresser vers un mieux… Faute de quoi la vie que l’on vit n’est pas vraiment humaine et elle va s’étiolant dans la dépression et la tristesse.


L’exemple des fils d’Israël au désert nous permet de réfléchir sur la vie. Avant que Moïse ne les en délivre ils étaient en esclavage dans le pays d’Egypte et ils faisaient des briques, des briques, des briques… ils avaient du pain à manger – et même nous rapporte la Bible « des poissons qui ne leur coûtaient rien, des concombres, des melons, des poireaux, des oignons et des aulx » - ils avaient à manger mais ils n’avaient aucun but dans la vie. Et Dieu par Moïse va leur faire découvrir la vraie vie : ils vont comprendre que l’homme ne vit pas seulement de pain. Les enfants savent cela très bien qui ont plus souvent envie de s’amuser que de se nourrir. L’amusement vient de ce qu’on l’on construit quelque chose, que l’on apprend, que l’on vit une aventure.


Mais vous me direz que, malheureusement, tout ce que l’on construit un jour sera détruit, tout ce que l’on apprend un jour ne nous servira plus à rien car l’aventure a une fin qui pour tout homme est la mort. C’est la raison pour laquelle l’unique but qui peut donner sens à la vie ne peut être au fond que la vie elle-même : mais une vie qui ne sera pas limitée par la mort, une vie éternelle. « Celui qui me mangera vivra par moi, dit Jésus. Tel est le pain qui descend du ciel : il n’est pas comme celui que vos pères ont mangé. Eux, ils sont morts ; celui qui mange ce pain vivra éternellement » (Jn 6,57-58). Celui qui reçoit Jésus dans la sainte communion a Jésus en lui et peut grâce à cette présence mener sa vie avec comme but la vie éternelle. Le ciel est ouvert au dessus de sa tête. Cela me rappelle une petite fille de 7 ans qui s’appelait Claire. Un jour sa maman lui demande : « As-tu pensé à offrir ton cœur et ta journée ? », elle lui répondit : « Bien sûr ! J’y pense toujours, sans ça, à quoi je sers ? »


Demeurer avec Jésus pour être avec lui en Dieu, et donc déjà d’une certaine façon dans la vie éternelle, c’est tout le sens de la communion à son Corps et à son Sang.

Celui qui la reçoit de tout son cœur découvre une intensité de vie et de joie intérieure que la plupart ignorent : « En effet, ma chair est la vraie nourriture ». Sans cette nourriture, ma vie manquerait de couleurs et d’enthousiasme : elle deviendrait très vite fade et probablement que je retournerais en esclavage pour faire des briques, des briques et encore des briques ! Au contraire grâce à cet aliment venu du Ciel, nous nous découvrons petit à petit faits non pas pour la mort mais pour la vie, celle qui ne passe pas.


Rendons grâce à Dieu de cet admirable sacrement, de ce sacrement de la vraie vie et qu’en ce dimanche, où pour beaucoup d’entre nous, nous le recevons pour la première fois, nous puissions la vivre avec l’intensité d’une première communion. Amen.


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