Je pense vous avoir dit que Dieu est évident. C’était audacieux, car pour beaucoup c’est tout le contraire. Dieu est la « chose » la moins évidente qui soit. Mais laissons cela de côté… Venons-en au Dieu tel que nous l’avons appris de nos pères, au Dieu que nous côtoyons et que nous prions. Le Dieu dont témoigne la Bible.
Ce Dieu est avant tout un Dieu qui parle : « Et Dieu dit… » (Gn 1,3) Or parler, dans le chef de Dieu, ce n'est pas rien ! Dieu n’ouvre pas la bouche pour parler de la pluie et du beau temps, pour bavarder, ni même pour nous communiquer un renseignement utile. Il n'y a rien de commun entre la parole de Dieu et la voix lisse et sans intériorité de ce robot qui annonce l'arrivée de train à la gare centrale.
En effet, quand Dieu parle, c’est pour se dire, pour s’exprimer, pour se révéler : Dieu ne dit rien qui ne vienne de ses profondeurs. Jamais la parole de Dieu ne sera en porte-à-faux par rapport à lui-même. Dieu est incapable de mentir (He 6,18). C’est là que réside la puissance et l’autorité de la parole divine.
Plusieurs conséquences peuvent être tirées de cela. La première, c’est que nous pouvons avoir confiance dans la parole de Dieu et croire en lui. La deuxième, c’est que tout ce qui est double est confondu par l’unité qui il y a entre Dieu et sa parole. Par exemple, lorsque Jésus parle, l’hypocrisie des pharisiens ne pouvait pas ne pas apparaître au grand jour. Autre exemple : la parole divine fera mentir la mort ; elle y mettra un terme définitif. Car la mort est une réalité double : elle est séparation de l’âme et du corps. Troisièmement, la parole de Dieu est pénétrante. Comme une épée à deux tranchants, elle va jusqu’aux jointures de l’âme (He 4,12). Elle interroge la conscience ; elle l’éduque ; elle l’éclaire.
La parole de Dieu possède aussi cette facette : elle opère un jugement en séparant le bon grain de l’ivraie, le juste du méchant, les brebis des chèvres. Reconnaissons que cet aspect de la parole de Dieu est plus terrible que les autres. Il n’a pas échappé aux anciens Hébreux. A l’Horeb, certains ne voulaient plus entendre Dieu leur parler à travers la nuée (voir Dt 18,16). Rappelons à ce propos que la première parole de Dieu a été prononcée vers le néant: « Que la lumière soit ! – Et la lumière fut ». Cette première parole, a été spontanément et immédiatement obéie : « Dieu parla et ce qu’il dit exista ; il commanda et ce qu’il dit survint » (Ps 33,9). Quand elle est prononcée vers les hommes, il est naturel que la parole de Dieu prenne la forme du commandement. Elle attend elle aussi d’être obéie, mais elle rencontre des nuques raides, des fils d'hommes qui ont peu ou prou une âme d'adolescent rebelle.
Enfin, il y a encore un dernier aspect de la parole de Dieu que je voudrais mettre en évidence. Jésus s’est présenté comme celui qui prononce les paroles de Dieu. Nous en avons un exemple dans le passage d’aujourd’hui : « Venez à ma suite et je vous ferai pêcheurs d'homme », dit-il à Simon et à André. Voilà qu’en une seule phrase on trouve un appel est une promesse. Voilà aussi de la part des deux frères une réponse entière et généreuse. « Aussitôt, nous dit l’Évangile, laissant leurs filets, ils le suivirent. Jésus a donc été préféré aux biens matériels et à la famille. Pourquoi ? Parce que sa parole est allée droit au cœur, comme une flèche. Elle y a laissé une blessure d’amour dont on ne doit jamais guérir. Nous voyons que la parole divine découvre à l’homme le sens de sa vie, sa destinée, sa vocation.
Je voudrais terminer ces mots en adressant à ceux pour lequel Dieu n’est pas évident. Qu’ils ne nourrissent aucun complexe ! Qu’ils ne se creusent pas trop la tête ! Il s’agit, pour découvrir Dieu, d’ouvrir son oreille. C’est un sacré défi pour tout le monde, y compris et surtout pour ceux pour lesquels Dieu semble évident.
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