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FRANÇOIS

Louvain-la-Neuve

Homélie pour la fête de la Croix glorieuse | 14/09/2025 | P. Damien Desquesnes


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La fête d’aujourd’hui est liée à la consécration — la dédicace — de l’église de l’Anastasis à Jérusalem, église que nous, Latins, appelons la basilique du Saint-Sépulcre. Si vous y êtes déjà allés, vous avez pu vous rendre compte qu’il s’agit de l’église la plus bizarre du monde. Elle veut en effet englober à la fois le lieu de la crucifixion et celui de la sépulture du Seigneur. À la fois le lieu de sa passion et de sa mort sur la croix et le lieu de son ensevelissement et de sa résurrection.

Le lendemain de l’anniversaire de la dédicace, l’évêque de Jérusalem faisait l’ostensoir de la relique de la croix et bénissait l’assemblée des fidèles. L’ancienne liturgie ne cessait de magnifier la croix ; elle en montrait le retentissement. Ses bras signifient qu’elle embrasse tout l’univers créé. Plantée en terre, elle atteint les profondeurs des enfers et transperce le cœur du démon. Mais par sa hauteur, elle touche le ciel, jusqu’au trône de Dieu.

Naturellement, frères et sœurs, cette fête serait impossible sans l’« invention » de la croix, c’est-à-dire sa redécouverte par sainte Hélène. Cette redécouverte est l’événement significatif de la paix dont l’Église pouvait commencer à jouir à partir de l’édit de Milan (en 313), lequel mettait fin à la persécution du christianisme. La publication de cet édit de tolérance est consécutive à la victoire de Constantin sur son rival, Maxence, lors de la bataille du Pont Milvius, près de Rome, le 28 octobre 312. Cette victoire est aussi liée à la croix. Selon le témoignage d’un historien chrétien, Eusèbe de Césarée, Constantin vit, un peu avant la bataille, un chrisme — les lettres 𝚾 (chi) et 𝚸 (rho) — ou une croix dans le soleil. L’empereur et ses soldats virent dans ce signe une protection : « in hoc signo, vinces », ce qui veut dire « par ce signe, tu vaincras ». On fit mettre ce signe sur les étendards des légions et on attribua ainsi la victoire du pont Milvius à la puissance de la croix.

Puisque ce n’est pas tous les ans que la fête de la croix glorieuse tombe un dimanche, je vous propose de méditer cet événement.



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Il représente en effet un tournant. Voilà que l’empereur se place sous l’étendard de la croix, et non plus sous les aigles de Rome. Désormais l’empire est appelé à mesurer tout ce qu’il doit au Crucifié. Il est maintenant fini le temps où la puissance des armes avait force de loi, où elle pouvait impunément s’imposer au faible. L’empire aura à tenir compte de cette révolution d’état d’esprit. Il ne pourra plus mettre le Crucifié sur un piédestal et en même temps piétiner le pauvre, car le Crucifié est le pauvre par excellence. Un principe doit désormais inspirer toute législation : le respect de la dignité humaine, une dignité qui est la même pour tous.

Certes, les chrétiens n’ont pas attendu la paix de Constantin pour honorer la dignité humaine. À cause de leur attachement au Crucifié et de façon instinctive, ils condamnaient l’avortement et l’abandon d’enfants ; l’impudicité et les orgies les répugnaient.

À présent, l’État lui-même ne pouvait plus se désintéresser du sort des plus fragiles. Il se devait d’avoir de la considération pour les malades, les esclaves, les vaincus, les prisonniers, les veuves et les orphelins, les étrangers, les indigents, les personnes handicapées, les vieillards, etc…

Jusqu’il y a quelques années, il y avait encore une trace de cela chez nous : un crucifix ornait souvent les salles des tribunaux. Nos juges avaient ainsi sous les yeux le sort de quelqu’un qui a passé en faisant le bien (Ac 10,38), mais qui fut victime de la jalousie des grands-prêtres (Mt 27,18) et condamné à mort par la lâcheté de Pilate (Mt 27,24). Moralement, ils se devaient d’accomplir leur office sans passion mauvaise et de veiller à ne pas condamner un innocent.


Frères et sœurs, les trois dimanches précédents, nous avons abordé le thème de la croix. Elle était la porte étroite par laquelle il fallait passer pour être sauvé. Nous avons découvert dans la lettre aux Hébreux un encouragement à passer cette porte en nous appuyant sur la force de l’espérance. Enfin, le Seigneur nous invite à porter nos croix en engageant notre amour dans de petites choses, celles que nous rencontrons au jour le jour.

Mais la fête d’aujourd’hui nous appelle à élargir notre regard. La présence et l’influence de la croix ne se restreignent pas à la vie personnelle. La fête nous donne de découvrir la puissance d’inspiration de la croix dans la vie des peuples et de l’humanité. Elle nous permet de voir alors que la croix — contrairement à ce qu’on pense habituellement — n’est pas un signe confessionnel qui divise. Elle est le rappel à honorer l’égale dignité des enfants des hommes.

Ne versons pas trop facilement dans l’idéalisme.

L’empire de Constantin n’a pas changé du jour au lendemain son système législatif. Lui-même recevra le baptême sur son lit de mort. N’allons pas croire trop naïvement que les royaumes chrétiens vivaient en parfait accord avec l’Évangile.

Et ne pensons pas non plus qu’il ne reste plus rien de l’esprit du Crucifié depuis la Révolution française et la fin des États explicitement chrétiens. Ce respect de la dignité humaine, nos démocraties l’honorent en nous garantissant la liberté de conscience. Dans l’isoloir, nous faisons un choix pour lequel nous n’avons de compte à rendre qu’à nous-mêmes : ni à notre conjoint, ni à notre curé.

L’Église rappelle toujours le caractère sacré de notre conscience. Certes, l’Église ne nous dit pas pour qui nous devons voter ; et en ce sens, elle ne fait pas de politique. Elle nous interpelle cependant — et il faut entendre cette interpellation — en nous demandant de ne pas éteindre notre conscience. Éteindre sa conscience, c’est accepter cette contradiction qui consiste à donner son suffrage à qui bafouerait la dignité humaine. En ce sens, l’Église n’ignore pas l’importance de la politique.


Je voudrais terminer en vous disant qu’aujourd’hui c’est l’anniversaire de mon ordination sacerdotale. Je garde de ce jour deux souvenirs.

Premièrement, en remettant la patène et le calice, l’évêque encourage le nouveau prêtre à être conscient de ce qu’il fera dans la célébration de l’eucharistie et à se conformer au mystère de la croix du Seigneur. Le jour de la fête de la croix glorieuse est donc particulièrement indiqué pour devenir prêtre.

Le deuxième souvenir, c’est le début de la prière d’ordination. L’évêque prie en s’adressant ainsi à Dieu : « Sois avec nous, Seigneur, Père très saint, sois avec nous. Toi qui fondes la dignité de la personne humaine et qui répartis toutes grâces… » Encore « la dignité de la personne humaine »…

Puisse l’Église avoir la joie de compter sur des évêques et des prêtres courageux à défendre la dignité humaine. Puissent ceux-ci avoir la joie de découvrir leur peuple engagé dans cette noble cause.

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