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Homélie pour le 5E Dimanche de carême 03/04/2022 | P.Damien Desquesnes.

Dernière mise à jour : 15 avr. 2022



Dimanche dernier, nous avons entendu la parabole du fils prodigue. Elle nous rappelait que la miséricorde de Dieu est donnée à l’homme sans mérite de sa part. Cependant, l’amour de Dieu n’est pas le seul de ses dons… La Loi l’est également. Or la Loi enseigne ce qui est bien et ce qui est mal, ce qui plaît à Dieu et ce qui lui déplaît. Y a-t-il compatibilité entre la Loi et la miséricorde! ? Celle-ci noie-t-elle les manquements à l’égard de la Loi, sans autre forme de procès! ? Ou, au contraire, la Loi délimite-t-elle un domaine où la miséricorde n’aurait plus droit de cité!!? Pour aller plus loin, demandons-nous ce que représente le don de la Loi.

Nous pouvons dire assurément que nous n’aimons pas la Loi. Nous l’avons d’ailleurs écrit sur les murs de Paris en mai 1968!: «!Il est interdit d’interdire!!!» Mais pour Israël, la Loi est son privilège!: «! Heureux sommes-nous, Israël! ! Ce qui plaît à Dieu nous fut révélé.! » (Ba 4,4) Israël est le seul peuple au monde à savoir comment marcher ici-bas pour être agréable aux yeux de Dieu.

En méditant son histoire, il a compris que la cause de tous ses malheurs est de s’être écarté de la Loi. On comprend qu’après l’Exil est né un mouvement de zèle pour la Loi. L’on cherchait à l’appliquer dans les moindres détails de la vie quotidienne et dans toute sa pureté. À l’époque de Jésus, ce mouvement était porté par les scribes et les pharisiens. Nous ne connaissons le nom d’aucun d’entre eux, à part Nicodème. Mais s’il n’apparaît que plus tard dans le Nouveau Testament, Paul en est un exemple remarquable. Dans la lettre aux Philippiens, il se présente comme «! Hébreux fils d’Hébreux! ; circoncis dès le huitième jour!; quant à la Loi un pharisien!; quant à la justice que donne la Loi, un homme irréprochable! ». Nous le retrouvons d’ailleurs à une autre lapidation, celle du diacre Étienne. Paul n’a pas jeté une seule pierre, mais saint Luc rapporte qu’il approuvait ce meurtre. Nous voyons là une sorte d’incompréhension entre Paul, le pharisien, et la Voie de l’Évangile, incompréhension que l’apôtre ne surmontera qu’après sa conversion. Alors, où est le problème!? Quel est ce ver qui ronge le zèle pour la Loi, qui pourrit celui-ci de l’intérieur pour l’opposer à l’Évangile! ? C’est ici qu’il faut avoir de la finesse… Celui qui met son ardeur à appliquer la Loi finit en fait à chercher autre chose que Dieu.


C’est étonnant, mais Paul, dans sa lettre aux Romains, interpelle le Juif comme ceci! : «! Toi qui te glorifies dans la Loi! » (Rm!2,23), sous-entendu!: «! qui regardes les autres de haut! ». Paul se considère non pas comme quelqu’un qui se glorifie dans la Loi, mais en Dieu. Nous avons une illustration de cet esprit dans la parabole du pharisien et du publicain. Le premier rend grâce à Dieu de ce qu’il n’est pas voleur comme le publicain, qu’il jeûne deux fois par semaine et qu’il paie la dîme. En fait, cet homme ne cherche pas la gloire de Dieu, mais il encense sa propre réussite religieuse!: il se glorifie lui-même de son observance de la Loi. Il se repose dans le sentiment d’être juste… C’est précisément ce mécanisme d’autoglorification que Jésus démonte dans le passage entendu aujourd’hui!: «!Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre. Quel trait de génie! ! Avec un peu d’ironie, l’Évangile note qu’ils s’en allaient les uns après les autres en commençant par les plus âgés.

Attention! ! Jésus ne met pas la Loi de côté. La femme qu’on amène devant lui est bien une pécheresse!; et elle l’est vraiment à ses yeux. Il le sous-entend d’ailleurs quand il la renvoie!: «!Va. Désormais ne pèche plus.!» Mais la justice de cette femme ne repose plus sur la Loi!; elle la reçoit du Christ. Paul ne dira pas autre chose après sa conversion!: «!tous les avantages que j’avais dans le judaïsme, je les considère comme une perte à cause de ce bien qui dépasse tout, la connaissance de

Jésus mon Seigneur!». La femme amenée aux pieds du Seigneur est déjà condamnée. En réalité, c’est le procès de Jésus qui commence. Il vient de gagner la première manche. Bientôt, il y en aura une deuxième!: quand il comparaîtra devant le Sanhédrin. L’attaque sera plus réfléchie, plus machiavélique. Mais c’est toujours entre Jésus et les pharisiens la même divergence d’esprit. Le Seigneur la dépeint au chapitre cinq de l’Évangile de Jean. S’adressant aux Juifs, il dit!: «!Vous recevez votre gloire les uns des autres, et ne cherchez pas la gloire qui vient du Dieu unique.! » Cette opposition mènera le Seigneur jusqu’à la croix.

En effet, Jésus ne cherche pas la gloire qui vient des homme, mais celle qui vient de Dieu. C’est pourquoi, il n’éprouve aucun honte à s’asseoir avec les pécheurs, ce qu’illustre son attitude vis-à-vis de la prostituée!: «!moi non plus, je ne te condamne pas.!». Frères et sœurs, soyons bien pénétrés de l’esprit qui fut celui du Seigneur!: ne pas chercher sa propre gloire, mais celle qui vient de Dieu. La liturgie nous y a appelés dès le début de ce carême. En nous invitant à jeûner, à prier et à partager, elle nous invitait à le faire non pour être vu des hommes, mais de notre Père qui est aux cieux et qui voit dans le secret. C’est ainsi que nous nous approcherons du mystère incandescent de la mort et de la résurrection du Christ. C’est ainsi que nous vivrons cet appel de Paul! : «! Il s’agit de connaître le Christ, d’éprouver la puissance de sa résurrection et de communier aux souffrances de sa Passion.!»


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