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PAROISSE

SAINT  

FRANÇOIS

Louvain-la-Neuve

Homélie pour le le fête de l'Assomption | 15/08/2025 | P. Damien Desquesnes


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Vous le savez, il y a bientôt deux ans, je me suis rendu au Japon. Ce n’était pas un voyage touristique, comme le font des millions de personnes qui s’y rendent chaque année. J’ai voulu marcher sur les pas des kakure kirishitan. Ces « chrétiens cachés » sont restés fidèles à la foi des premiers évangélisateurs du Japon pendant toute cette période où le gouvernement japonais interdit l’accès au pays des missionnaires étrangers (fin XVIe — milieu XIXe). Ils durent apprendre à tenir bon pendant deux siècles et demi sans la visite d’un prêtre… Leur foi et leur persévérance m’ont impressionné.

Mais il y avait une autre raison à ce « pèlerinage ». J’ai en effet cette conviction, frères et sœurs, qu’il y a un lien entre la Vierge Marie et le Japon. Je n’ai aucune preuve pour avancer cela, seulement des signes…

 

Tout d’abord, l’évangélisation du Japon a commencé le 15 août 1549, quand saint François-Xavier débarqua à Kagoshima, dans le sud de l’île de Kyushu. Il annonça la Bonne Nouvelle avec intelligence et, point essentiel, en respectant l’organisation sociale du pays. Il s’adressa en premier lieu aux nobles ; il obtint leur conversion et, ensuite, celle de leurs sujets. C’est ainsi que la cause de l’Évangile connut un essor rapide.

Ensuite, le 15 août 1945, l’Empereur réussit enfin à prendre l’ascendant sur les partisans de la guerre à outrance. Il s’adressa à l’armée et à la nation pour faire part de sa décision d’arrêter les combats. L’Empereur fut obéi, ce qui impressionna beaucoup les Américains. Cela contribua grandement à son maintien sur le trône après la guerre. Quoi qu’il en soit des circonstances précises, la deuxième guerre mondiale prit fin le jour de la fête de l’Assomption. Petite anecdote encore… Il y a quelques années, les nationalistes pressèrent le premier ministre de visiter le sanctuaire de Yasukuni à l’anniversaire de la fin de la guerre. Dans ce temple, on honore la mémoire des anciens combattants, dont plusieurs criminels de guerre. Une visite du premier ministre aurait fâché les pays voisins du Japon. Mais le chef du gouvernement de l’époque s’appelait Taro Aso. Il était catholique et il déclina l’invitation en invoquant le fait qu’il devait se rendre à l’église ce jour-là pour assister à la messe. Quand la Vierge Marie fait de la diplomatie…

Enfin, le 15 août 1281, un typhon dévasta la flotte mongole qui venait d’appareiller pour envahir le Pays du soleil levant. Les Japonais donnèrent le nom de « kamikaze » à cette tempête, littéralement le « vent des dieux ». C’était providentiel, car le Japon était trop faible face à la puissante armée mongole.

 

Cette convergence de signes — ces grands événements qui eurent tous lieu en la fête de l’Assomption — m’incline à croire dans le regard bienveillant de la Vierge Marie sur le Japon.

Encore une fois, je parle de signes, non pas de preuves. Les preuves sont faites une fois pour toutes ; elles doivent convaincre l’esprit par les certitudes qu’elles apportent, mais elles ne suscitent pas autant de dynamisme que les signes. Ceux-ci par contre s’accumulent au cours du temps et forgent une conviction. Il n’est pas étonnant que les signes de l’attention et de la bienveillance de la Vierge Marie aient accompagné les chrétiens cachés tout au long de leur histoire.

 

Pendant deux siècles et demi, les chrétiens japonais vécurent leur foi dans la clandestinité. Ils cachèrent leur dévotion à l’égard de la Vierge Marie à l’aide d’une statue bouddhiste qui lui ressemblait à s’y méprendre. La police et les inquisiteurs du shogoun qui inspectaient les maisons n’y voyaient que du feu.

Lors de la réouverture du Japon (milieu du XIXe siècle), les missionnaires français obtinrent le droit d’ouvrir une église dans le port de Nagasaki. Un mois après son inauguration, le 17 mars 1865, le père Petitjean accueillit un groupe de femmes du quartier d’Urakami. Elles firent le tour de l’église et découvrirent la statue de la Vierge que les missionnaires avaient ramenée de France. En la voyant, ces femmes surent que ces missionnaires étaient comme ces prêtres qui avaient évangélisé leurs ancêtres. Beaucoup de chrétiens cachés, en apprenant la nouvelle, prirent le risque de montrer leur foi au grand jour. Une partie d’entre eux furent arrêtés et dispersés dans plusieurs lieux de détention. Le sort de ceux qui furent gardés à Tsuwano, dans l’île de Honshu, fut particulièrement difficile. Ils furent soumis à la torture pour qu’ils renoncent à leur foi. L’un d’eux, nommé Yasutaro, fut enfermé jour et nuit dans une petite cage. On sait, par un de ses codétenus, que chaque nuit, il recevait la visite d’une dame vêtue de bleu. Nous comprenons aisément qu’il s’agit de la Sainte Vierge.

Moi-même, je peux témoigner qu’en visitant les villages chrétiens des îles Goto, il y a toujours une statue de la Vierge à côté de l’église. Souvent il s’agit d’une copie de Notre-Dame de Lourdes. Et quelquefois, il y a une reproduction de la grotte de Massabiel, avec de l’eau qui coule d’une source.

 

J’évoque ici des signes, et non pas des preuves. Les preuves s’imposent à l’esprit humain et donne la sécurité d’avoir saisi un appui ferme. Les signes sont quelquefois déconcertants. Comment reconnaître alors que ce sont des signes ? Comment les déchiffrer ? Comment découvrir leur signification ?

 

Je prends un exemple. Nous avons commémoré il y a quelques jours le bombardement atomique de Nagasaki. Le 9 août 1945, un vent déporta la fameuse bombe, qui explosa presque à la verticale de la cathédrale d’Urakami. Le bâtiment fut anéanti en un instant, avec tout le quartier chrétien aux alentours. La population catholique fut plus que décimée.

Où est le signe ? Parfois les choses ne s’éclairent que bien plus tard. Quelques mois après l’explosion de la bombe, il y eut une cérémonie d’hommage. C’était aux alentour de Noël. Le docteur Nagaï — un Japonais converti au catholicisme — prit la parole. Pour lui, pas de doute ! C’était la main de Dieu qui avait ainsi guidé la bombe, faisant de la mort des chrétiens d’Urakami un sacrifice pour la paix. Telle était sa conviction ; et, on peut aisément l’imaginer, elle fit scandale chez beaucoup.

Mais, parmi des décombres de la cathédrale, on retrouva la tête de la statue de la Vierge. Elle était calcinée et les yeux lui manquaient. Aujourd’hui elle a retrouvé sa place dans la nouvelle cathédrale, mais longtemps, elle a voyagé de part le monde. En mai 2010, elle fut installée au siège des Nations Unies à New-York, à l’occasion d’une conférence sur la paix. Ainsi, la Vierge de Nagasaki fut la meilleure ambassadrice de la cause du désarmement.

 

Tout ce que je viens de vous dire, frères et sœurs, ce sont des choses que j’ai peu à peu mises ensemble. Je n’ai pas une once de preuve pour le soutenir. À mes yeux, ces éléments ont valeur de signe ; ils veulent dire quelque chose.

Des signes, nous en trouvons quelquefois dans notre vie personnelle et, à vrai dire, nous en avons davantage besoin que de preuves. Souvent ils sont de toutes petites choses. Mais pour celui qui les discerne et les reconnaît, ils revêtent une importance considérable. Le signe donne alors à la foi un nouvel élan, un enracinement plus profond, la certitude que sa vie a un sens et enfin cette conviction qu’il n’est pas laissé à lui-même dans la jungle de cette vie terrestre.

Pour le peuple chrétien, pour le Japon et sa communauté catholique, pour chacune de nos vies, la présence et l’action de la Vierge Marie est manifestée sous la forme de signes. Ici, sur la terre, les signes sont de tout petits éléments. Ce n’est qu’au ciel que le signe est grandiose, comme nous l’avons entendu dans le passage du livre de l’Apocalypse. C’est le Signe de la femme qui met au monde un enfant mâle, qui remportera la victoire sur le dragon. Les signes annoncent tous la victoire de Dieu !

 

Je voudrais terminer ce sermon un peu plus long que d’habitude — veuillez m’en excuser — par cette considération. Je viens de vous le dire, les signes sont souvent de petits éléments, des « presque riens ». Au Japon, l’Église est un « presque rien » ; elle représente à peine 0,3% de la population ; et comme le reste du pays elle souffre de la dénatalité.

Mais rappelez-vous de ce mot du pape François lors de sa visite au Maroc : être peu nombreux n’est pas si grave du moment qu’on n’est pas insignifiant. La petite Église catholique du Japon est là comme un signe au milieu de son pays, un signe de l’amour et de la bienveillance de Dieu et de la Sainte Vierge. Ce signe sera brillant si la foi de cette Église reste vive et sa charité active. Jusqu’à aujourd’hui, elle a été riche de beaucoup de saints — de courageux martyrs. Ce mot de la lettre à Diognète (datée probablement de la fin du IIe siècle) lui va à merveille : « Le poste que Dieu lui a assigné est si noble qu’il ne lui est pas permis de le déserter. » (À Diognète VI,10)

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