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VENDREDI SAINT | P. Damien Desquesnes | 10/04/2020



Le calme de ces derniers jours nous permet d’entendre ou de redécouvrir le chant des oiseaux. Cela me rappelle une expérience que nous pouvons tous faire et qui me remplissait de désolation quand j’étais un enfant : les oiseaux nous fuient quand nous nous approchons d’eux. Ils tirent avantage de leurs ailes pour se rendre inaccessibles.


Pourquoi vous parlais-je de cela ? Parce que c’est la même désolation qui habite le cœur de Dieu à l’égard des hommes. Il veut se réconcilier avec eux, mais ils fuient sa Présence ; Il veut leur accorder son pardon et ils s’effraient d’entendre sa voix ; Il veut leur faire miséricorde, mais ils n’ont aucune idée de cette miséricorde. Les hommes en effet ne peuvent concevoir qu’il y a dans le cœur de Dieu une réserve d’amour capable d’anéantir leur faute et de leur rendre leur innocence. C’est à cause de cette ignorance qu’Adam s’était dissimulé dans un buisson après avoir mangé le fruit défendu. De Dieu, il avait reçu et il savait le commandement, mais pas sa miséricorde… Voilà pourquoi la Présence divine était perçue comme une accusation, bien que Dieu fût toujours animé des meilleurs intentions à son égard.


Quel défi pour Dieu ! Comment rattraper cette bête blessée qu’est l’homme, lui prodiguer les remèdes à son mal sans qu’il se débatte, ajoutant ainsi des plaies à ses blessures ?

La Révélation nous montre que Dieu, à l’égard de l’homme pécheur, n’utilise pas la ruse ou l’astuce, comme s’il voulait l’attirer dans un piège et lui imposer quelque paix. Non !


Dieu use de patience. Comme le dit saint Paul, l’amour prend patience (1 Co 13,4). Et c’est d’ailleurs pour cela que l’histoire sainte est si longue…

Au sommet de celle-ci, il y a cette magnifique icône de patience qu’est le Crucifié. Jésus est patient parce qu’il ne rejette pas ceux qui le rejettent ; il est patient parce qu’il ne juge pas par lui-même, mais il attend le jugement de Dieu. « Insulté, il ne rendait pas l’insulte ; souffrant, il ne menaçait pas, mais s’en remettait à Celui qui juge avec justice » (1 P 2,23).


Frères, à la course avec les pécheurs, c’est Dieu qui gagne. À la longue, ceux-ci se fatiguent de décamper ; et une vie cachée, ils s’en rendent compte, n’est pas une vie. L’oiseau qui s’envole doit bien trouver, à un moment ou à un autre, une branche pour se poser. Or la Croix donne l’occasion aux pécheurs de s’approcher de l’innocence sans craindre d’elle la moindre accusation. Elle est tout le contraire d’un épouvantail. Elle est ce lieu où la vérité que le pécheur porte en lui - je veux dire sa culpabilité - peut se libérer paisiblement. Là, il peut confesser sa faute et déposer son fardeau ; là, les indurations de son cœur se liquéfient; là commence la contrition qui change la raideur et la dureté en tendresse.


La Croix est le centre de la liturgie du Vendredi saint. L’âme remplie d’action de grâce pour tant de patience, contemplons la croix et sa puissance ! Elle a en effet ce pouvoir d’arrêter la course folle de l’humanité. Elle a cette faculté de convertir le chemin du mal en marche vers le bien.

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